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5 IMMUNOTOXICOTHÉRAPIE : Progrès, échecs et promesses en 1997

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Chantal Bismuth - Réanimation Médicale et Toxicologique, Hôpital Fernand Widal, Université Paris VII, Paris

L'utilisation d'anticorps à visée thérapeutique en toxicologie ou immunotoxicothérapie est potentiellement un des meilleurs procédés de détoxification qui soient. (1) Cette technique thérapeutique a une histoire, des exigences, des succès, des échecs et des espoirs.

1 - Principes de l'immunotoxicothérapie

Chronologiquement, l'immunothérapie suit toujours les mêmes étapes:

1. création d'une immunisation active chez l'animal ( c'est-à-dire, induction d'une sécrétion d'anticorps protecteurs par des injections répétées d'antigènes ), c'est le principe d'une vaccination;

2. utilisation du sérum de l'animal immunisé pour fixer, extraire et éventuellement éliminer un toxique grâce à des liaisons actives spécifiques à partir de différents entités moléculaires d'anticorps ( Tableau I ). Cette immunisation passive est le principe de la sérothérapie;

3. fragmentation des anticorps (Fab', Fab'2, Fv) souvent entreprise avec le triple but: susciter le moins possible de réaction d'intolérance à ces protéines étrangères; étendre leur volume de distribution pour traquer les toxiques dans leurs sites; permettre leur élimination par voie rénale.

2 - Choix de l'antigène

Etant donné son coût élevé de fabrication, l'immunotoxicothérapie s'applique aux toxiques:

- dont le risque de mortalité est élevé à court terme (digoxine, antidépresseurs tricycliques, colchicine, paraquat, venins de serpent ou de scorpion);

- qui sont capables d'induire des réponses immunitaires avec production d'anticorps, ce qui inclut des molécules de nature et de poids moléculaire ( allant des haptènes aux macromolécules) très variables;

- qui permettent une fixation de l'anticorps variable selon le volume de distribution du toxique qui peut varier de plusieurs centaines de litres pour les toxiques à faible poids moléculaire (digoxine, colchicine, paraquat) au seul secteur extracellulaire pour les toxiques de poids moléculaire élevé (venins);

- dotés d'effets réversibles (toxique fonctionnel) ; rien ne prouve que les atteintes lésionnelles organiques soient réversibles après traitement par anticorps (ce qui explique probablement leur inefficacité sur l'herbicide paraquat) ; cependant, les anticorps peuvent neutraliser un toxique circulant ou résiduel avant sa fixation, alors que la majeure partie de ce toxique a déjà altéré l'organisme, une intoxication létale peut alors être transforée en une affection compatible avec la survie.

Certains toxiques sont dangereux à la dose de quelques milligrammes (digoxine, colchicine) ; l'efficacité de leur neutralisation stoïchiométrique par anticorps a été mise en évidence. D'autres intoxications sévères le sont pour des doses de 10 à 100 fois plus élevées (antidépresseurs tricycliques, cloroquine) ; l'administration de doses massives d'anticorps spécifiques ou de leurs fragments n'a pas, actuellement, dans ces situations, de base clinique.

Des réserves éthiques et économiques pourraient d'ailleurs être émises. Il est néanmoins possible qu'une neutralisation partielle se révèle, dans ce cas, efficace, comme nous le verrons.

3 - Qualité de l'anticorps.

Le choix de la taille de l'anticorps : (immunoglobulines IgM, IgG ; fragments liant l'antigène Fab'2, Fab) dépend de la distribution des toxiques : IgM et IgG sont acceptables pour ceux dont la distribution est vasculaire ; les fragments Fab, Fab'2 sont préférés pour ceux dont la distribution est extravasculaire. (Tableau I)

TABLEAU I : LES TOXIQUES ET LEURS ANTICORPS POTENTIELS
TOXIQUE ANTICORPS POIDS MOLÉCULAIRE
Lipopolysaccharides des bacilles gram-négatifs IgM600.000
Toxine tétanique IgG180.000
Venins de vipère ou de scorpion Fab2, Fab'2 100.000
Digoxine, colchicine Fab, Fab' 50.000
Antidépresseurs tricycliques Fv22.000
Ig : immunoglobuline

Fab : région liant l'antigène (antigen-binding)

Pour former des complexes anticorps-toxique stables, les sites de liaison de l'anticorps doivent avoir une très grande affinité pour le toxique. Cette affinité est testée en laboratoire avant toute application.

PREMIERS SUCCÈS : LES ANTI-VENINS DE SERPENTS ET DE SCORPIONS

L'histoire de l'utilisation thérapeutique des anticorps commence en 1887, quand Sewall rapporte que des pigeons peuvent être protégés contre une envenimation par l'inoculation préventive de venin. Curieusement, Sewall (2) n'envisageait pas d'extension thérapeutique à son travail. Heureusement, Calmette (3) montrait en 1894 qu'un animal pouvait être protégé contre l'envenimation avec le sérum d'un autre animal « mithridatisé» par ce même venin. Le concept de sérothérapie était donc né. Mais ces pionniers ne réalisèrent pas que cette thérapie implique un constituant sanguin que nous appelons maintenant anticorps, ni que le fondament de leur travaux reposait sur une interaction spécifique : la liaison antigène-anticorps. En fait, Calmette affirmait initialement que son sérum anti-cobra pouvait traiter toutes les morsures de serpent. Brazil (1901) (4) démontrait bientôt que le sérum anti-cobra ne protège pas contre les venins de crotales. Dès 1900, Ehrlich (5) proposait les termes «Immunité» et «anticorps». Sa description a permis de concevoir comment un sérum peut protéger le receveur. Cette conception théorique était nécessaire comme base des recherches futures.

La tendance actuelle de préparer des anticorps polyclonaux plutôt que monoclonaux, et des anticorps ovins plutôt qu'équins, semble essentielement liée à un problème de technicité industrielle. Le risque de prions dans les tissus ovins peut, à l'avenir, modifier cette tendance.

La fragmentation des anticorps accroît leur sécurité et minimise les risques de maladie sérique, si invalidante. Certes utiles contre des haptènes (< 1.000 Da), elle reste discutable contre des toxiques de haut poids moléculaire, comme le sont les venins animaux, dont le complexe toxique-Fab peut largement dépasser 60.000 Da, donc incapable de filtration glomérulaire. Les avantages du fractionnement pouraient alors ici être dépassés par l'instabilité du complexe avec risque de relargage secondaire du toxique.

Reste que des très nombreuses études avec fragmentation (6) s'effectuent actuellement contre les crotalidés, les vipères, les scorpions et semblent promettre une meilleure efficacité, à moindres doses et à risques de sensibilisation diminués.

UNE DÉMARCHE ABOUTIE : LES ANTICORPS ANTI-DIGITALIQUES

L'immunotoxicothérapie contre les digitaliques reste un prototype de pensée scientifique et d'accomplissement clinique:

Production actuelle des Fab

La molécule de digoxine étant trop petite pour être immunogène (780 Da), les moutons sont tout d'abord immunisés avec un complexe digoxine-sérum albumine (la sérum albumine étant une protéine porteuse). Puis les sérums sont recueillis chez les animaux ayant des titres élevés d'anticorps à haute affinité et spécificité pour la digoxine. Les anticorps anti-digoxine (IgG) sont séparés et hautement purifiés. Le clivage de l'IgG par la papaïne donne 2 fragments Fab et un fragment Fc. Les fragments Fab, spécifiques de la digoxine, sont ensuite séparés par chromatographie d'affinité. Les fragments Fab sont 3 fois plus efficaces que les IgG (150.000 daltons). Leur petite masse moléculaire (50.000 Da) favorise une action plus rapide que les IgG, du fait de leur plus grand volume de distribution, et permet une élimination rénale précoce du complex Fab-digitalique.

Avec l'élimination des déterminants antigéniques et du site de fixation du complément (Fc), l'immunogénicité des fragments Fab se trouve atténuée, comparée à celle de l'IgG entière, diminuant ainsi le risque de réaction immune.

Mécanisme d'action

Les fragments Fab ont une double action, toxicodynamique et toxicocinétique (15). Administré par voie veineuse, l'anticorps se lie à la molécule de digitalique circulante et engendre un complexe Fab-digitalique inactif car incapable de se lier aux récepteurs des digitaliques : les adénosine-triphosphatases : (ATPases membranaires). Quoique la concentration sanguine totale du digitalique s'élève de 5 à 20 fois (correspondant au digitalique complexé par le Fab), le taux du digitalique sanguin libre devient nulle quelques minutes après l'injection des anticorps. Suivant la loi d'action de masse, la digitaline intracellulaire et qui est celle liée aux récepteurs sont déplacées, et les ATPases membranaires ainsi réactivées. Lorsque la fonction rénale est normale, la demi-vie d'élimination des complexes Fab-digitaliques est d'environ 10 à 20 h, inférieure à la demi-vie spontanée qui est de 36 h pour la digoxine et de 160 h pour la digitoxine. À cette action toxicocinétique des fragments Fab, s'ajoute une action toxicodynamique. En pratique courante, l'immunothérapie corrige les symptômes de l'intoxication digitalique aiguë (digitoxine ou digoxine) en moins de 60 min.

Effets indésirables

À ce jour, aux États-Unis, plus de 1 000 observations de patients traités par fragments Fab pour des intoxications aiguës par digitaline potentiellement létales ont été rapportées (16). Les effets secondaires liés aux fragments Fab sont rares.

Des réactions d'hypersensibilité (réactions allergiques à type de rash prurigineux) ont été rapportées dans 0.8% d'un collectif de 717 adultes.

Il est possible que les Fab aggravent une insuffisance cardiaque préexistante. C'est pourquoi, en cas d'insuffisance cardiaque, un traitement par inotropes peut être nécessaire après une neutralisation complète.

Une rechute des signes toxiques peut survenir après immunothérapie, correspondant à une redistribution de digitaliques non liés (phénomène de «redigitalisation» spontanée). La réapparition des nausées et vomissements annonce cette «redigitalisation» qui, de nouveau, peut s'accompagner de troubles du rythme sévères. Ce risque existe chez les patients ayant reçu une dose de fragments Fab inférieure à 50% de la dose adéquate.

Indications des Fab (15)

Une neutralisation par Fab est coûteuse * et semble plus efficace pour prévenir que guérir une fibrillation ventriculaire ou une asystole. Toutefois, une neutralisation équimolaire n'est pas toujours nécessaire.

* Un flacon de Digidot (Boerhinger Mannhein) contient 80 mg de Fab et neutralise 1 mg de digitoxine ou de digoxine. Le coût d'un flacon est d'environ 5 000 F. Digibind (Wellcome) (1 500 F), est moins onéreux que Digidot, mais le flacon ne contient que 40 mg de Fab.

Traitement prophylactique

Cette attitude cherche à prévenir les troubles du rythme graves. Elle consiste en une perfusion précoce de la moitié de la dose équimolaire de fragments Fab. Elle concerne les intoxications aiguës marquées par une bradycardie isolée chez des patients ayant des facteurs de mauvais pronostic : sexe masculin, âge supérieur à 60 ans, antécédents de cardiopathie, bloc auricoloventriculaire, hyperkaliémie dépassant 4.5 mmol/L. Dans ces cas, l'administration différée de Fab expose à la survenue brutale d'arythmies fatales, malgré la pose préventive d'un entraînement électrosystolique. L'échec de l'atropine pour accélérer la fréquence cardiaque au delà de 60/min doit conduire à l'administration d'une dose prophylactique (neutralisation semiéquimolaire) par perfusion lente (en 1 heure). Si la fréquence cardiaque reste en deçà de 60/min, une nouvelle dose est administrée. Il faut souligner que le bénéfice clinique d'une dose semi équimolaire de Fab n'a pas encore été évalué dans cette situation : si le médecin décide de traiter une intoxication par digitalique, responsable d'une bradycardie isolée, rebelle à l'atropine, par une dose sémi équimolaire de Fab, nous insistons sur la nécessité d'une surveillance étroite et prolongée du patient (au moins pendant 72 h). Chez l'enfant, du fait du faible poids corporel, une neutralisation équimolaire est toujours préférable.

Traitement curatif

Une administration curative reste adaptée en cas de complications menaçant immédiatement le pronostic vital : troubles du rythme ventriculaire (tachycardie ventriculaire ou fibrillation ventriculaire), bradyarythmie ou bradycardie sinusale inférieure à 40/min réfractaire à 1 mg d'atropine, bloc auriculo-ventriculaire de 2e ou de 3e degré avec rythme ventriculaire lent : asystole ventriculaire ; hyperkaliémie supérieure à 6 mmol/L ; infarctus mésentérique ou choc cardiogénique. Chez ces patients, une dose curative de Fab (neutralisation complète équimolaire) doit être administrée sans délai et rapidement (en 15 min). Les tests cutanés ne semblent pas nécessaires pour détecter des réactions d'hypersensibilité.

Posologie des fragments Fab

La dose est calculée à partir de la quantité totale de glycoside digitalique dans l'organisme ; laquelle est estimée soit de la quantité ingérée, soit à partir de la concentration sérique (15). Comme la biodisponibilité des digitaliques (quantité absorbée entre 20 et 80% de celle ingérée) et le délai entre l'ingestion et l'admission sont variables, la quantité totale de digitalique calculée à partir de la dose ingérée pourrait mener à une surestimation. Nous suggérons, en dehors de l'urgence extrême, d'utiliser la concentration plasmatique de digitalique pour connaître la dose de fragments Fab à administrer (Tableau II).

TABLEAU II : CALCUL DE LA QUANTITÉ TOTALE DE GLYCOSIDE DANS L'ORGANISME (15)
À partir de la dose ingérée Charge digitalique = dose ingérée (en mg) x facteur de biodisponibilité de la digoxine (60%) ou de la digitoxine (100%)
À partir de la concentration sérique de glycoside Charge digitalique = concentration sérique de glycoside (ng/mL) x volume de distribution (VD) x poids corporel (kg).

VD de la digoxine = 5,6 L/kg

VD de la digitoxine = 0,56 L/kg

En cas d'intoxication sévère chez l'adulte, si la quantité ingérée est inconnue, une dose de 800 mg de Digidot (10 flacons) est recommandée. Cette dose neutralise 10 mg de digitaline. Dans notre expérience, 800 mg de Fab ne suffisent pas pour une neutralisation complète dans toutes les intoxications aiguës volontaires par digitalique, puisque les doses ingérées peuvent être extrêmes. Aussi, si une dose initiale de 800 mg de Fab ne réussit pas à réduire un trouble du rythme, une autre dose de 800 mg doit être tentée.

En cas de surdosage digitalique chronique, une dose moyenne de 80 à 160 mg de Fab est généralement suffisante.

UN ÉCHEC : LES ANTICORPS MONOCLONAUX ANTI-ENDOTOXINE

Le souhait d'utiliser les anticorps dans le traitement des septicémies découle du mauvais pronostic avec septicémies à bacilles gram-négatifs, malgré le traitement antibiotique usuel. Mortalité et morbidité peuvent être théoriquement diminuées par une interruption de la cascade inflammatoire déclenchée par l'infection. Une fois enclenchée, en effet, cette cascade inflammatoire induit chez l'hôte des lésions tissulaires éventuellement mortelles. Ces manifestations toxiniques des bacilles gram-négatifs semblent liées à un lipopolysaccharide, composant de la membrane extracellulaire des bactéries. Ce lipopolysaccharide (ou endotoxine) se compose de 3 parties: une chaîne polysaccharide 0, qui est connectée à une région centrale R, elle même liée au lipide A. Le lipide A, partie toxique de l'endotoxine, existe dans la plupart des espèces bactériennes. Des anticorps monoclonaux dirigés contre le lipide A pourraient théoriquement interrompre la cascade inflammatoire au cours des infections à bacille gram-négatif.

Deux anticorps monoclonaux dirigés contre l'endotoxine bactérienne ont été développés pour le traitement adjuvant des septicémies à bacilles gram-négatifs (17, 18). E5 est un anticorps monoclonal d'origine murine (IgM), produit chez la souris immunisée avec la souche eschérichia coli J5, qui se lie à l'épitope du lipide A. HA-1A est un anticorps monoclonal qui se lie lui aussi au lipide A ; il est obtenu à partir d'un hétérohybridome produit par les cellules spléniques de patients vaccinés avec eschérichia coli J5 avant splénectomie. E5 et HA-1A ont été testés lors d'essais cliniques contrôlés, mais aucun n'a réduit de manière significative la mortalité au cours des septicémies et n'a donc pu être approuvé par la Food and Drug Administration aux États-Unis.

Récemment, une étude sur les anticorps anti-tumor-necrosis-factor s'est aussi révélée un échec (19). La prochaine décennie verra peut-être l'avénement d'un anticorps monoclonal véritablement efficace dans le traitement des septicémies à bacilles gram-négatifs.

UNE AVANCÉE : LES ANTICORPS ANTI-COLCHICINE

Jusqu'à récemment, il n'existait pas de traitement spécifique de l'intoxication par la colchicine, dont la mortalité est de 90% pour des doses supérieures à 0.8 mg/kg. Le pronostic est particulièrement sévère en cas de collapsus hémodynamique précoce. Or, en 1980, alors que la fixation intracellulaire de la colchicine était considérée comme une limite à l'efficacité de l'immunotoxicothérapie, une réversibilité de fixation sur les microtubules a été mise en évidence in vitro (20). Une immunisation active était obtenue en 1989 chez des lapins. Ceux-ci, immunisés, survivaient à une dose létale (21). De la même façon, des souris résistaient aux mêmes doses létales lorsqu'elles reçevaient des IgG d'origine caprine après la phase de distribution (22). En 1990, une autre équipe réussissait avec un anticorps monoclonal à annuler les effets in vitro de la colchicine sur des anomalies cellulaires de hamster, même si l'anticorps était administré 6 h après le toxique (23). La fragmentation de ces anticorps caprins permit de passer à l'application humaine (24).

Modification de la toxicodynamique sous traitement par anticorps (cas clinique)

Une femme de 25 ans a été admise à l'hôpital à Bordeau, 24 h après l'ingestion de colchicine, 1 mg/kg. Elle présentait des vomissements, une diarrhée, une hypotension avec une sévère déshydratation intracellulaire. Elle fut réhydratée et transférée sous dobutamine à Paris à la 36e h. Elle est consciente, en collapsus cardiovasculaire avec une oligurie et un syndrome de détresse respiratoire aiguë. Le facteur V de la coagulation était à 5% avec un important saignement aux points de ponction. Une surveillance hémodynamique continue par cathétérisme cardiaque droit montrait un état de choc cardiogénique réfractaire à la dobutamine. Les facteurs pronostiques annonçaient 99% de chance de décès dans les 24 h. Avec son consentement, la patiente reçu, à la 40e h, une neutralisation à 0,125 molaire de la dose ingérée de colchicine par des anticorps spécifiques d'origine caprine, ce qui représentait, à cet instant, un rapport anticorps/colchicine circulante de 0,4. En cours de perfusion, l'état de choc devint maîtrisable par les amines pressives. Le sevrage en médicaments cardiotropes fut possible 36 h après l'admission. Le syndrome de détresse respiratoire aiguë mis plus longtemps à guérir.

Au 3e jour, apparu une aplasie médullaire, contemporaine d'une infection bactérienne sensible aux antibiotiques. La neutropénie a duré 2 jours. Une alopécie survint dans les suites. S'installa aussi une polynévrite sensitive transitoire des membres inférieurs. La tolérance locale de l'immunothérapie fut parfaite. Il n'y a pas eu de maladie serique. Finalement la patiente survit. Un an plus tard, il n'existe pas de séquelles.

Modification de la toxicocinétique sous anticorps

Quarante heures après l'ingestion de 60 mg de colchicine, la patiente reçut 6,4 g de fragments Fab spécifiques en perfusion sur 7 h par voie endocavitaire à travers un cathéter de Swan Ganz. A l'arrivée à l'hôpital de Bordeaux, à la 27e h après l'ingestion, la colchicinémie était à 24 ng/mL. Dix minutes seulement après le début de la perfusion de Fab, (40 h après l'ingestion), la concentration de colchicine totale s'élevait jusqu'à 6 fois la concentration initiale. La colchicine libre devient indétectable sur une période de 7 h. Une diminution de 4,4 fois le volume de distribution de la colchicine sous traitement Fab indique qu'une quantité importante de colchicine est déplacée des sites périphériques et redistribuée dans l'espace extracellulaire correspondant au volume de distribution des fragments Fab. La perfusion de Fab a augmenté 6 fois le taux d'excrétion urinaire (24 et 134 µg/h respectivement avant et après l'administration de Fab). La colchicine fut éliminée par voie rénale, liée pour 98% aux fragments Fab sur une période de 16 h. La quantité de Fab liée à la colchicine excrétée par voie rénale était égale à la quantité de fragment Fab recueillie dans les urines. Ainsi la neutralisation par les fragments Fab est proche de 100%. La quantité de colchicine neutralisée est estimée à 3,7 mg sur les 9 mg de colchicine présente dans l'organisme avant l'administration des Fab. L'hypothèse d'extraction cellulaire de la colchicine par les anticorps est donc confirmée.

Cette observation est restée unique car aucune équipe ne dispose actuellement de stock de ces anticorps caprins.

LES ESPOIRS

Immunothérapie dirigée contre les antidépresseurs tricycliques

Les fragments d'anticorps spécifiques sont cliniquement utilisables contre les morsures de serpents, au cours des intoxications à la digoxine ou à la colchicine. Les antidépresseurs tricycliques étant la première cause de mort par intoxication volontaire aux États Unis (25), une immunotoxicothérapie pouvait être envisagée. La dose mortelle d'antidépresseurs tricycliques (ADT) était 10 à 100 fois plus élevée que celles des toxiques précédemment étudiés, la neutralisation devrait requérir des doses correspondantes d'anticorps plus élevées (jusqu'à plusieurs g/kg). Des études préliminaires sur les anticorps spécifiques contre les antidépresseurs tricycliques suggèrent que l'administration de telles doses n'est sans doute pas indispensable.

Des Fab' monoclonaux à haute affinité pour les antidépresseurs tricycliques ou des fragments Fab polyclonaux d'origine ovine s'opposent rapidement à la toxicité cardiovasculaire des tricycliques désipraminiques chez le rat et augmentent la survie. L'effet thérapeutique survient en quelques minutes et est évident avec des doses relativement faibles de Fab et Fab' (10 à 30% de la dose équimolaire de désipramine), suggérant que ces fragments d'anticorps redistribuent préférentiellement la désipramine en dehors d'un compartiment rapidement rééquilibré (26).

Les Fab' ou Fab sont généralement bien tolérés chez le rat, mais des doses plusieurs fois supérieures à celles utilisées chez l'homme pour d'autres toxiques peuvent entraîner des troubles cardiovasculaires ou la mort. Un rat sur huit recevant de fortes doses de fragments Fab spécifiques anti-tricycliques meurt (2 g/kg représentant un rapport molaire Fab/désipramine de 0,22). La mort des animaux peut s'expliquer par la perfusion rapide de quatités relativement élevées de Fab. La stratégie pour l'avenir consiste à diminuer les doses nécessaires. L'association molaire de Fab spécifiques anti-tricycliques au bicarbonate de sodium molaire, traitement standard de l'intoxication aux ADT, semble plus efficace chez le rat que chaque traitement séparément (27). Le développement de fragments d'anticorps plus petits est aussi possible. Une chaîne de fragment Fv, qui a la moitié de la taille des fragments Fab, a été clonée et conserve une grande affinité pour la désipramine. Comme la chaîne de fragment Fv a une demi-vie d'élimination plus courte et une excrétion rénale plus importante que les Fab, elle présente un intérêt thérapeutique potentiel (28).

Ces diverses données suggèrent que l'utilisation de fragments d'anticorps spécifiques est cohérente dans le traitement de l'intoxication par antidépresseur tricyclique.

Immunothérapie anti-cocaïne

En 1972, la preuve d'une immunisation active entre la morphine était apportée (29). Mais cette thérapeutique n'eut pas à être proposée à l'homme, l'apparition de la naloxone périmant d'emblée l'expérimentation clinique. C'est la loi du genre : chaque fois qu'un traitement, relativement moins coûteux, efficace, et sans activité intrinsèque, c'est à dire inactif en l'absence du toxique, apparaît, il l'emporte immédiatement.

Récemment, en Californie, Carrera (30) a réalisé chez le rat une immunisation active contre la cocaïne, problème majeur de la société américaine (2 millions d'usagers). La molécule de cocaïne, en elle-même trop petite pour être immunogène, a été fixée à une molécule plus grande, la protéine keyhole limpet hemocyanin (KLH) utilisée comme porteur pour induire une réponse immunitaire. La procédure d'immunisation court-circuite le système nerveux central et évite le passage hémato-encéphalique de cocaïne. Ni stimulation de l'activité comportamentale ni dépression n'ont été observées après immunisation, résultats cohérents avec l'impossibilité pour le conjugué de traverser la barrière hémato-encéphalique. La molécule n'a apparemment pas d'acticvité intrinsèque et n'a montré aucun effet secondaire sur les groupes de rats rendus immuns à la dépendance. Après obtention de l'immunisation par le conjugué stable, l'activité motrice induite par la cocaïne et les comportements stéréotypés étaient abolis chez les rats (mais non ceux induits par l'amphétamine, drogue-contrôle). De plus, après injection aiguë de cocaïne, les concentrations de cocaïne dans le striatum el le cervelet des animaux immunisés étaient très abaissés par rapport à ceux des animaux témoins.

Après ce procédé d'immunisation active (avec projet d'un vaccin), une recherche d'immunisation passive (projet d'une sérothérapie) peut être envisagée. Actuellement, en France, sont testés la possibilité de fabriquer des fragments Fab anti-cocaïne ; des modèles animaux montrant l'inhibition de la capture cérébrale et myocardique de la cocaïne et aussi, peut-être, l'extrusion de la cocaïne de ces sites, sous l'effet du sérum ; la préparation de Fab anti-cocaïne comme médicament utilisable chez l'homme pourra venir ensuite.

CONCLUSION

L'utilisation d'anticorps anti-toxiques est entrée en pratique clinique courante contre les venins des serpents et de scorpions et contre les digitaliques.

Son indication a été étendue à la colchicine (mais sans disponibilité banalisée des anticorps caprins spécifiques à ce produit).

L'immunotoxicothérapie pourrait s'étendre dans les prochaines années aux antidépresseurs tricycliques et à la cocaïne.

RÉSUMÉ :

L'immunotoxicothérapie est utilisée contre les animaux venimeux depuis presque un siècle. Les années récentes ont apporté des innovations majeures dans sa sécurité et son efficacité, grâce aux procédés de fragmentation permettant une distribution plus grande et une sensibilisation moindre avec élimination rénale. Ces progrès sont patents dans le cas des digitaliques et de la colchicine. Des espoirs existent pour les antidépresseurs tricycliques et la cocaïne. L'efficacité de l'immunotoxicothérapie ne supprime pas la nécessité d'un traitement symptomatique agressif au cours des intoxications menaçant le pronostic vital. Ses effets secondaires apparaissent rares et mineurs : ils sont dus à l'hétérogénéité des sites de liaison active et à l'immunogénicité (avec ses risques d'hypersensibilité et de maladie sérique). Le coût élevé de l'immunotoxicothérapie et les restrictions de ses indications aux médicaments toxiques à doses faibles (de l'ordre de quelques mg) limitent pour l'instant son usage.

Références

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22 - Terrien N, Urtizberea M, Scherrmann JM. Reversal of advanced colchicine toxicity in mice with goat colchicine-specific antibodies. Toxicol Appl Pharmacol 1990, 104: 504-510

23 - Rouan Se, Otterness I, Cunningham A, Holden H, Rhodes C. Reversal of colchicine-induced mitotic arrest in Chinese hamster cells with a colchicine-specific monoclonal antibody. Am J Pathol 1990, 137: 779-787

24 - Baud FJ, Sabouraud A, Vicaut E, Taboulet P, Lang J, Bismuth Ch, Rouzioux JM, Scherrmann JM. Treatment of severe colchicine overdose with colchicine-specific Fab fragments. N Engl J Med 1995, 332 10: 642-645

25 - Litovitz T, Schmitz BF, Bailey KM. 1989 annual report of the American Association of Poison Control Centers National Data Collection System. Am J Emerg Med 1990, 8: 394-442

26 - Pentel PR, Ross CA, Landon J, Sidki A, Shelver WL, Keyler DE. Reversal of desipramine toxicity in rats with polyclonal drug-specific antibody Fab fragments. J Lab Clin Med 1993, 123 3: 387-393

27 - Brunn GJ, Keyler DE, Pond SM, Pentel PR. Reversal of desipramine toxicity in rats using drug-specific antibody Fab'Fragment : effects on hypotension and interaction with sodium bicarbonate. J Pharmacol Exp Ther 1992, 260 3: 1392- 1399

28 - Pentel PR, Keyler DE. Drug-specific antibodies as antidotes for tricyclic antidepressant overdose. Toxicology Letters 1995, 82/83: 801-806

29 - Berkowitz B, Spector E. Evidence for active immunity to morphine in mice. Science 1972, 178: 1290-1292

30 - Carrera RA, Ashley JA, Parson LH, Wirsching P, Koob GF, Janda KD. Suppression of psychoactive effects of cocaïne by active immunization. Nature 1995, 378: 727-730

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6 NEW FRONTIERS IN CLINICAL TOXICOLOGY

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Stephen W. Borron, M.D., M.S. - Visiting Researcher. Service du Pr. Bismuth, Réanimation Médicale et Toxicologique, Hôpital Fernand Widal, Université Paris VII, Paris

New Antidotes

Two additional antidotes are likely to be available this year in Europe and in the United States. Neither of these drugs is truly "new", as clinical treatment with the drugs has been going on at Fernand Widal Hospital and a few other centers for greater than 10 years. While hydroxocobalamin and 4-methylpyrazole are already familiar drugs to all clinical toxicologists and to many intensive care specialists, it is worthwhile to review the indications for these drugs and to compare them with other available antidotes.

Hydroxocobalamin

Hydroxocobalamin (Cyanokit®, Lipha SA, Lyon, France) (HOCo) is vitamin B12a, a water-soluble active form of vitamin B12. It is found naturally in the body in very small concentrations, and has been used to treat B12 deficiency in small doses. Its interest in toxicology is due to its strong affinity for the CN- ion, forming an irreversible bond in vivo, thus making HOCo a potentially useful cyanide antidote.

Advantages

HOCo has a number of advantages over existing cyanide antidotes, first among these being safety. HOCo, in clinical experience as an antidote, used in doses of 5-15 grams has proven to be extraordinarily safe. Clinically, it improves hemodynamics, raising blood pressure and sometimes reversing cardiac arrest in patients with cyanide-associated cardiovascular collapse, but without significant adverse effects on blood pressure or pulse in patients subsequently found not to be intoxicated with cyanide. Furthermore, it has been found to result in no significant biological (laboratory) alterations in intoxicated or non-intoxicated patients. Occasional transient eosinophilia has been observed, however no lasting effects have been noted on renal, hepatic, or hematologic indices when followed for three days after treatment. Anaphylaxis, which has been reported after repeated IM injection of hydroxocobalamin has not been observed in the patients treated at Fernand Widal.

This safety must be compared with that of other antidotes. the other available cobalt-based antidote is dicobalt EDTA. This antidote, while efficacious in the presence of cyanide, may be quite dangerous to administer in the absence of poisoning, making correct diagnosis critical. Dicobalt EDTA may result in severe headache, nausea and vomiting, hypotension and hypoglycemia. Because cyanide poisoning is difficult to confirm prior to antidotal treatment, this renders dicobalt EDTA a relatively poor choice.

The current alternative to cobalt-based antidotes are the methemoglobin formers, sodium nitrite and dimethylaminophenol (DMAP). While the antidotal mechanism of these drugs remains to be completely clarified, it is known that they form methemoglobin, which has the capacity to bind with cyanide to form cyanmethemoglobin, which may then transfer the cyanide ion to thiol groups of natural rhodanese or to sodium thiosulfate to form excretable thiocyanates which are much less toxic. The problem with the methemoglobin formers is that they deprive the body of oxygen carrying capacity. As cyanide inhibits the oxidative phosphorylation pathways, oxygen deprivation may be further compounded by this diminution in carrying capacity. In smoke inhalation victims (a common source of cyanide poisoning), lung thermal and chemical injury result in diffusion abnormalities and decreased environmental oxygen, along with carbon monoxide result in a situation of both simple and chemical asphyxia.

Thus any futher decrease in oxygen availability may be detrimental. In addition to their effects on oxygen carrying capacity, the methemoglobin inducers may result in hypotension, due to their vasodilatory properties. Deaths have occured due to overzealous administration of these drugs.

Sodium thiosulfate, a thiol group donor which may replace or replenish native rhodanese, is efficacious and safe but works to slowly to be used alone in serious cyanide poisoning.

It is too early to compare these agents for efficacy. While hydroxocobalamin appears to be efficacious in clinical experience, controlled trials have not been conducted to compare it with other antidotes, and may never be, due to the rarity of pure cyanide poisonings and the inability to safely use other agents in the setting of smoke inhalation. Additional laboratory comparisons would be useful, however.

Disadvantages

Hydroxocobalamin must be given in enormous doses (up to 15,000 x doses used for vitamin deficiency) to bind cyanide in an equimolar fashion and is relatively unstable in solution. This previously posed a manufacturing problem, which has been resolved through the production of a lypholized product which comes in a ready to mix package with a diluent. It is much more expensive than nitrites, but given the relatively infrequent use of cyanide antidotes, this should not pose a significant economic problem in developed countries.

Dose and Administration

Hydroxocobalamin 5 grams is administered in normal saline as an infusion over 20 minutes in adult patients. In the case of cardiac arrest, the initial dose and repeat doses may be given more rapidly. HOCo may also safely be repeated if response is judged inadequate, up to a total dose of 15 grams. Additional doses generally should be administered over a longer period of time (several hours).

For poisonings by cyanide gas or salts, a single dose adequate to bind the cyanide present should be sufficient, as the blood half-life of cyanide is about 1 hour, whereas that of HOCo is about 20-26 hours. In the case of poisoning by nitriles (R-CN), in vivo metabolism to cyanide may require additional doses of hydroxocobalamin and/or administration of sodium thiosulfate.

The dose for children is 50 mg/kg IV.

4-Methylpyrazole

4-methylpyrazole (Fomepazole®, Orphan Medical, Minnetonka, MN, USA) (4-MP) is a reversible inhibitor of alcohol dehydrogenase (ADH), the enzyme responsible for metabolism of ethanol, isopropanol, methanol, ethylene and diethylene glycols (EG and DEG), and glycol ethers. Significant clinical experience has been obtained for its use as an antidote in ethylene glycol poisoning. Its use in two clinical cases of methanol poisoning and in a case of diethylene glycol poisoning suggest that it may be effective for these poisonings as well. 4-MP works by preventing the metabolism of these alcohols to their more toxic metabolites, thus allowing them to be excreted unchanged.

Advantages

The standard treatment of poisoning by alcohols and glycols has been the administration of ethanol, a competitive ADH substrate (not inhibitor) and dialysis. There are several advantages of using 4-MP. First, as it is not a substrate for alcohol dehydrogenase and has a stronger affinity for the enzyme than the toxic alcohols. Ethanol, which has a greater affinity than methanol, EG, and isopropanol, is effective in blocking their metabolism. However, it complicates treatment in that the patient must be maintained in an intoxicated state, resulting in behavioral problems. Adequate blood ethanol concentrations can be difficult to maintain (particularly in chronic alcoholics) and children tolerate ethanol very poorly. They may develop severe hypoglycemia, hypothermia, and coma if doses are excessive. Dialysis is lifesaving, but is invasive and associated with significant complications. When 4-MP is administered early (before renal toxicity has occurred), dialysis may be avoided in many cases.

In addition to these advantages, 4-MP levels are unnecessary for treatment (not true for ethanol therapy). It may pose a significant advantage in countries where dialysis is not widely available, particularly in epidemics of toxic alcohol or glycol poisoning.

4-MP has been shown to be safe in laboratory and clinical trials. While transient mild elevation of hepatic enzymes has been reported, no long-term effects have been seen.

Disadvantages

The only apparent disadvantage of 4-MP compared with ethanol/dialysis is the duration of treatment. 4-MP treatment in EG poisoning generally requires only about 3 days in the hospital. However, because methanol has a much longer half-life, 4-MP treatment must be continued for 7-10 days (until methanol is undetectable). This time may be shortened by dialysis, thus the risk of dialysis must be weighed against the benefit of reduced hospitalization time.

Dose and Administration

4-MP is administered intravenously in a dose of 10-20 mg/kg/day in two divided doses given 12 hours apart. This dose is tapered successively (7,5/5/2,5 mg/kg/day) until the toxic alcohol or glycol is no longer detectable in the blood and urine. Clinical improvement in acidosis, mental status and renal function may be seen within a few hours of administration. Sodium bicarbonate or lactate should be given as well for the treatment of metabolic acidosis.

A New Frontier in our Understanding of Cellular Toxicokinetics

P-Glycoprotein (Multidrug Resistance Protein)

P-glycoprotein (P-GP) is a 190kd membrane glycoprotein which is also known as the multidrug resistence protein, or MRP. This is one of a group of proteins which provide a phylogenetically ancient mechanism for extruding xenobiotics from the cell. It has been isolated in bacteria and algae, in many animal species, and is found in varying quantities in many tissues in man, including kidney, liver, bile duct canaliculi, intestine, brain (blood brain barrier), testicle, placenta and blood cells. The importance of this protein in humans was first appreciated by oncologists, who discovered that certain tumors were much more resistant to treatment by chemotherapeutic agents. Subsequent studies have revealed that these tumors often have a much greater expression of the MDR-1 (multidrug resistance) gene, which codes for P-GP. This led to the search for modulators which might decrease either the activity of P-GP directly or the expression of the gene.

It is becoming increasing clear that P-GP has a pivotal role in the interaction of drugs and may significantly effect outcomes in poisoning. While studies of these effects are in their infancy, it is important to understand the potential consequences of P-GP in clinical toxicology.

A growing number of compounds are known to be inhibitors and/or substrates of P-GP:

Chemicals having P-GP interaction
Pesticides, Organophosphorous Chlorpyrifos oxon
Pesticides, Pyrethroids Deltamethrin
Pesticides, Organochlorine DDT
Calcium-channel blockers Verapamil

Azidopine

Nicardipine

Antibiotics, Macrolide Erythromycin

Josamycin

Antimitotics
Anthracyclines Daunorubicin

Doxorubicin

Vinca alkaloid Vinblastine

Vincristine

Actinomycin D
Steroids Dexamethasone
Calmodulin antagonists
Protein kinase C inhibitors
Quinine Derivatives Quinine

Mefloquine

Cloroquine

Colchicine
Cyclosporines
Taxus derivatives Taxol

Taxotere

Ivermectin

We are at the tip of the iceberg in our understanding of the important effects that P-GP and related proteins may have in clinical toxicology. A few examples suggest this importance, however.

First, P-GP may be responsible for many of toxic side effects seen in chronic therapy. It is known that digoxin is transported across cell membranes by P-GP (Shinkel). Quinine-derived compounds, such as quinidine and calcium channel blockers, such as verapamil are inhibitors of P-GP. Thus, inhibition of cellular excretion of digoxin may explain the fact that digoxin toxicity is sometimes seen in patients treated with quinidine and calcium channel blockers, even in the absence of "toxic" plasma concentrations of digoxin.

Furthermore, this same inhibition may result in exaggerated toxicity with certains toxins. We recently published a case of colchicine poisoning complicated by virtually steady state blood concentrations over the three days of the patient's survival (Borron et al, 1996). Colchicine is largely excreted by the bile (85%). P-GP is responsible for canalicular drug excretion and macrolide antibiotics, such as the josamycin taken by this patient along with the colchicine, may inhibit P-GP. Thus we believe josamycin resulted in decreased cellular and biliary elimination of colchicine, resulting in altered kinetics and ultimately the death of the patient.

It has also been shown that cancer patients previously exposed to pesticides may have elevated P-GP and not respond adequately to natural product chemotherapy (Lanning et al, 1996). It stands to reason that cancer patients who have developed MDR (due to increased expression of P-GP) may be resistant to other therapies as well and at greater risk after suicidal ingestion of P-GP transported toxins.

Epileptics may be resistant to treatment with anticonvulsants due to differing expression of P-GP (Tishler, 1995). Brain biopsy specimens of intractable epileptics had MDR1 mRNA levels greater than 10 times those of normal brain, thus explaining why "therapeutic" plasma concentrations are not protective in certain patients.

It has recently been shown that P-GP inhibition may be responsible for the neurotoxic side effects seen occasionally with mefloquine (Rifkin et al, 1996).

Clearly, we have much to learn about the role of P-GP and similar membrane protein pumps in clinical toxicology. Whether we will one day be able to manipulate these pumps (using inducers, perhaps, rather than inhibitors) to good use remains to be seen. Until such time, clinicians need to be aware of the possibility of increased toxicity whenever inhibitors of P-GP are present, and to keep this protein in mind when toxic effects are not easily explained, as in the case of "therapeutic" drug concentrations.

Further research is greatly needed.

References on request.

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7 Conclusioni

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Roberto Zoppellari - 1° Servizio di Anestesia e Rianimazione, Azienda Ospedaliera Arcispedale S. Anna, Ferrara

Anche se le intossicazioni rappresentano una causa non infrequente di ricovero ospedaliero, l'approccio corretto al paziente intossicato è spesso discusso se non controverso. Per questo ad alcuni esperti italiani di tossicologia è stato chiesto di puntualizzare lo stato dell'arte sulla gestione del paziente intossicato, adulto e bambino, e sulle possibilità laboratoristiche offerte al clinico.

Di quanto esposto dal Dott. Locatelli, intendo sottolineare la frase conclusiva: "l'efficacia del trattamento probabilmente diminuisce se è trascorsa più di un'ora dall'ingestione, ma non di meno è giustificata un'astensione dai trattamenti di decontaminazione, specie nel caso di intossicazioni da farmaci molto pericolosi o da sostanze chimiche non medicinali." Negli ultimi anni abbiamo assistito ad una modificazione della pratica della gastrolusi nell'avvelenamento acuto. Da un approccio largamente usato si sta passando ad un utilizzo estremamente restrittivo. Il relatore si è posto in termini intermedi: è un equilibrio che trova una sua motivazione anche nel fatto che, nel paziente intossicato gestitito in ambiente intensivo, il posizionamento di una sonda gastrica, eccetto alcune classiche eccezioni, rappresenta una consuetudine ed una necessità; di conseguenza anche una gastrolusi tardiva, come nella rianimazione tossicologica della Prof.ssa Bismuth, potrà essere forse di modesta utilità, ma non certamente dannosa. Non solo: oltre che di intervallo temporale fra ingestione e gastrolusi, si dovrebbe forse meglio precisare la tecnica attuata nel condurre la manovra.

Della relazione svolta dal Prof. Marchi ritengo importante richiamare l'esordio: "L'approccio all'avvelenamento in età evolutiva presenta elevati rischi di errore di sopravvalutazione, con eccesso di ricoveri, accertamenti, terapie, inutili se non dannosi, oppure di sottovalutazione, con omissione o ritardo di interventi indispensabili." Anche questo intervento si pone in termini di equilibrio.

Il supporto analitico nel corso delle intossicazioni è fondamentale nella gestione del paziente acutamente intossicato. Tale affermazione vale soprattutto per le intossicazioni comportanti grave rischio di vita, sia a fini diagnostici che prognostici, terapeutici e di valutazione dell'efficacia dell'approccio terapeutico. ( vedi a questo proposito uno studio sul paraquat pubblicato su questa stessa rivista, ESIA, vol 2, No 1, gennaio 1997, condotto in collaborazione con il laboratorio di tossicologia dell'Istituto di Medicina Legale e delle Assicurazioni dell'Università di Ferrara ). E la frase della Prof.ssa Montagna "un dialogo costantemente aperto fra curante e laboratorista, il quale ultimo non deve sentirsi un partner silenzioso bensì un interlocutore attento e critico nel processo di trattamento del paziente" indubbiamente richiama l'impegno alla collaborazione reciproca fra clinico ed analista.

Infine gli ospiti stranieri.

La Prof.ssa Bismuth: un'autorità mondiale in tossicologia clinica ! Lei stessa, a questo convegno, ha presentato l'VIII Congresso Internazionale di Tossicologia che si terrà a Parigi dal 5 al 10 luglio '98 , di cui è responsabile del comitato scientifico, oltre che essere vice presidente dell'International Union of Toxicology. L'intervento della Prof.ssa Bismuth è stato una vera e propria lezione magistrale. Una lezione sullo stato dell'arte dell'immunotossicoterapia, che possiamo ricordare con quanto è scritto nella sintesi dell'intervento distribuito ai partecipanti:

"- les antivenins de serpents et de scorpions ont 100 ans - les anticorps antidigitaliques: un succès - les anticorps monoclonaux anti-endotoxine: un échec - les anticorps anti-colchicine: une avancée - les anticorps contre les antidépresseurs tricycliques: une promesse - les anticorps anti-cocaïne: un projet".

Il Dott. Borron, formatosi alla Western University di Cleveland ed attualmente ricercatore nella rianimazione della Prof.ssa Bismuth, ci ha presentato caratteristiche, vantaggi e limiti di due nuovi antidoti: Idrossicobalamina e 4-Metilpirazolo. E soprattutto ci ha introdotti verso "new frontiers in clinical toxicology" con l'affascinante puntualizzazione sulla P-glicoproteina, molecola che provvede all'estrusione dalla cellula degli xenobiotici, influisce sulla terapia di alcuni avvelenamenti e sembra responsabile dell'esagerata tossicità di alcune sostanze per il suo ruolo di interazione tra farmaci. Una nuova frontiera nella comprensione della tossicocinetica cellulare è aperta, con l'obiettivo di comprendere oggi per riuscire a manipolare farmacologicamente domani questa pompa di membrana .

Come ha detto il Prof Avato, Preside della Facoltà di Medicina e Chirurgia dell'Università degli Studi di Ferrara, non si può parlare di tossicologia in questa città senza dimenticarne uno dei pionieri: Paracelso ( 1493-1541 ). Nella sede dell'Università possiamo leggere questa epigrafe: "In questo Ateneo conseguì la laurea in medicina il grande scienziato tedesco Theophrastus Bombastus von Hohenheim detto Paracelsus iniziatore di nuovi sistemi terapeutici maestro della scienza medica moderna filosofo naturalista di dignità europea". Con l'intuizione di questo pioniere - è la dose che determina l'intossicazione - la tossicologia cominciò a nascere.

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